Les saintes et le surineur

J’étais au bord de la rivière, le chapeau collé sur le visage, agité par les ronflements intempestifs que la sieste m’imposait. Une piqûre sur la fesse me réveilla subitement. Sans doute qu’une fourmi rouge que j’avais agacée en lui interdisant le passage, s’était tout bonnement vengée.

Les moustiques ne m’avaient pas épargné, mon visage était boursouflé. La colère me saisit. J’avais attendu le soleil avec avidité et je comptais en profiter. La nature s’offrait et me repoussait comme une vieille maitresse insatisfaite.

Posant un genou sur la mousse, je déclamais certains quatrains remplaçant quelques mots ici et là parce que ma mémoire était défaillante ou qu’il m’arrangeait de le faire. D’aucuns diront que mon comportement pouvait être burlesque : un petit vieux à la calvitie latente jouant les Montaigu au bord de la Saône.

J’imaginais bien l’Asphodèle ou la Soène me regarder comme un martien et me balancer leurs moqueries fallacieuses ou même l’Exécuteur dégainer son feu pour me tirer un plomb dans la caboche. Il était craquant, avec son Stetson et son pistolet qui, n’expulsait qu’un bout d’amadou enflammé par le frottement du silex. Il était hallucinant avec son arme le « futueur » et son sot briquet. Je rigolais de ce sicaire de pacotille qui ne rêvait que de me faire un trou de balle en plein milieu du front.

J’avais compris depuis longtemps que la chouanne et la gone étaient l’antidote à ma stupidité, et qu’elles ne sévissaient ici que pour canaliser mes pensées outrancières. Elles tentaient de m’arracher des promesses de bonne conduite Je les imaginais bien toutes les deux dans leur costume de bure me foudroyer du regard s’il m’arrivait d’associer langues et caresses, prêtes à me fustiger si je me lançais dans une démonstration des infortunes de la vertu.

Non, qu’elles soient pieuses, j’avais beaucoup de mal à le concevoir. En bref ! Le sexe se pratiquait mais ne se racontait pas, et moi je me contentais de raconter sans pratiquer.

Jamais donc, je ne montrerai mon calendrier des seins, vestige de mon adolescence, celui par lequel le déluge de mes sens m’inonda. Je n’étais pas si candide.

Voilà que le bord de l’eau me laissait rêveur. Pas un nuage à l’horizon alors place à la farniente et à mes pensées grivoises.

Orage et désespoir.

L’atelier d’écriture d’Olivia sur le blog : désir d’histoires avec les mots ci-dessous /

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17 réflexions au sujet de « Les saintes et le surineur »

  1. Hey ! Ca fait longtemps que les bonnes soeurs ne portent plus de bure hein ! Quelques « couventistes » peut_être et encore ! Ravie de voir que ces tenues te font fantasmer, nous v’là belles ! Mais comme dit l’adage « c’est pas celui qui dit qui fait !!! » Ha ha ! Ton texte est très bien écrit ! 🙂 (cela dit); Je pense que Wense va passer un contrat vite fait : tu l’as traité d’amateur là, si si !!! 🙂

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    1. Dommage qu’elles ne portent plus leurs costumes de bure, ça en ajoutait à ma libido ! 👿 Question WENS(e) a viré sa cuti ? Il est tant que tu retrouves tes bésicles, en fait baisicles me plait bien.
      Wens ne monte pas jusqu’à Paris on dirait, c’est un surineur de province !

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  2. Comme dit Asphodèle, numérote tes abatis, parce que le Wens, il va en avoir marre d’être cuisiné à toutes les sauces. 😉 Cependant, ton texte est excellent et bien écrit. 😀
    Quand au sexe, c’est le printemps qui te travailles. 😉

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    1. Sexe !!! tu as vu du sexe ? non , je te rassure ma libido est en dehors de toutes saisons mais comme dit l’adage rappelé par la nonne « c’est pas celui qui dit, qui fait. » Chacun est libre d’avoir ses croyances. 😈
      Quand au surineur Paris reste une ville inaccessible pour lui ! 😀

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  3. Ha Ha , il est extra ton texte, tout en finesse en fait, et j’aime bien les petites provocations envers la Chouane et la Gone…moi je serais plus infirmière ou soubrette que bonne soeur, enfin tout dépend de la soeur…

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  4. Tu as du courage, tu oses titiller la chouanne et sa copine la Gone…elles risquaient de te scalper mais vu que le poil semble rare sur ton caillou, le risque est minime.
    Nota: Wens est à Paris début juin, quelques expositions, une conférence sur Jack l’éventreur, et des petits boulots pépères….Il joint le surin à l’agréable.

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  5. « On » ricane dans mon dos… j’prends note… 😆
    Mais alors là, Jean-Charles, tu t’es surpassé dans l’écriture. Tu devrais penser à nous deux plus souvent 😆
    J’ai bien aimé, il faut le dire !
    Tu nous a bien un peu égratignées car tu sais bien que nous te pardonnons toujours tes écarts de plume !
    Tu peux dormir sur tes deux oreille, pas de contrat pour cette fois !
    Bon we et gros bisous d’O.

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