Elle lui tenait compagnie depuis fort longtemps mais ce jour-là même si elle lui faisait bonne figure elle se sentait déprimée. Sa maladie empirait , à rester assis toute la journée, il avait pris du poids et même avec l’aide de l’aide-soignante, s’occuper de lui devenait difficile.
Elle vivait dans le souvenir continuellement à la recherche des meilleurs moments qu’ils avaient partagés c’était un peu son antidote pour pouvoir faire face. Si au début elle lui parlait beaucoup elle avait cessé car évoquer leurs souvenirs n’éveillait en lui aucune réaction. Il la regardait avec des yeux vides et ne répondait jamais. Lui qui avait un regard si expressif, si malicieux n’exprimait plus aucune sensation.
La seule chose qui éveillait son regard ou le seul être qui pouvait provoquer une étincelle était l’évocation de leur chienne Youpie, une bâtarde de couleur noire qui partagea leurs vies pendant 18 années. Lorsqu’elle lui montrait des photos il s’agitait un peu, ses yeux s’enflammaient et parfois une larme coulait, solitaire sur sa joue. Elle s’interrogeait toujours, savoir si c’était bon pour lui, et craignant une rechute cessa d’y faire allusion.
Elle aimait repenser à leur mariage, cette douce cérémonie qui enfin les unit, même si elle eut quelques inquiétudes pour sa nuit de noce. Cependant les racontars dont certaines s’étaient faites confidentes eurent pu gâcher sa journée mais il n’en fut rien et Raymond fut un homme précautionneux et attentif si bien que cette première nuit si elle ne fut pas exceptionnelle resta pour le moins inoubliable. En tout cas elle fonda les bases d’autres nuits époustouflantes.
Raymond fut toujours scrupuleux, trop protecteur même si parfois c’était un peu prégnant. Cependant elle aimait sa force tranquille, sa façon d’être heureux d’un rien, d’embellir les choses, son optimisme inébranlable. Il était son chêne, son réconfort, son abri, celui qui lui donna une vie merveilleuse.
Certes il y eut des bas dans leur longue vie commune et si quelques uns tournèrent autour d’elle, elle ne succomba jamais. Quant à lui, elle ne se posa aucune question, pas de nature jalouse , l’idée qu’il put aller ailleurs ne l’effleura même pas. Elle l’aimait inconditionnellement, lui vouant une adoration sans borne.
S’ils se séparèrent pendant huit mois mais toujours réunis lors de fête de famille, elle état sûre, sans pouvoir l’expliquer, qu’il reviendrait vers elle. Certes elle vécut ces quelques mois difficilement, se remit en question puis sereine l’attendit.
Elle l’adorait son Raymond mais était surtout peinée de le savoir si dépendant maintenant.
La douleur qu’elle ressentit dans la poitrine la surprit. Elle tomba de sa chaise, s’écroula sur le sol ses dernières pensées furent pour lui, sa détresse si profonde, elle s’en voulut de l’abandonner, elle murmura des choses inaudibles.
Raymond assis sur sa chaise ne bougea pas d’un poil, la vie aussi l’avait oublié.
J’ai tenté une nouvelle expérience pour l’atelier d’écriture Bricabook mais mon manque d’habitude s’est fait ressentir