Cesare Liriccio (épisode 8)

Voici le début :  épisode 1 puis 2 et 3 suivi du 4 et 5 ensuite le 6 et le 7

Rentrée chez elle, elle était un peu désemparée par cette absence définitive. Lorsque le Hérisson avait été muté à Gisors, elle en avait été satisfaite. Il n’était pas trop loin, en même temps il l’était suffisamment pour redonner du souffle à leur relation. Cette pensée hybride l’avait surprise à l’époque.

Cigarette à la main, elle arpentait son vieil appartement situé dans une rue proche du quai des orfèvres, elle devait cette chance à un ami de son père qui le lui louait pour une somme modique. Ce qui leur permettait après des journées difficiles de se plonger rapidement au creux de leur intimité. Mais à l’inverse ils étaient les premiers en action s’il le fallait.

Sur le triptyque posé sur la cheminée de la chambre la photo de Cesare et son sourire ravageur était en évidence parmi d’autres photos, prises à l’Abbatiale Hôtel où ils avaient passé huit jours lors de leurs dernières vacances.

Cesare Liriccio était le véritable nom de celui qu’on appelait le Hérisson. Si son prénom avait été difficile à porter, il riccio en italien signifiait le hérisson, associé à son comportement asocial son surnom lui allait comme un gant. Comme l’animal Liriccio était un chasseur nocturne, comme l’animal il pouvait se mettre en boule, comme l’animal il piquait si l’on s’approchait de trop près.

Elle se servit un verre de guignolet omettant qu’elle détestait cette boisson trop sucrée qui lui mettait les intestins en circonvolutions. Accroché à la porte de sa chambre le masque vénitien qu’ils avaient rapporté d’un week-end sur les canaux transalpins lui fit surgir des émotions auxquelles elle ne s’attendait pas. Elle le caressa avec délicatesse sans s’émouvoir de la froideur de sa texture.

Elle s’assit sur le lit, pensive, fixant avec attention le visage de celui qu’elle aimait.

Elle n’arrivait pas à croire qu’il ne serait plus là ; elle ne pouvait imaginer sa vie sans lui, même si leur façon de vivre semblait étrange à leurs connaissances, même si leur ciel était plutôt orageux, elle l’aimait. « Inutile de pleurer » se dit-elle « je vais te faire vivre quoi qu’il en soit. »

Du fond de l’armoire italienne, elle extirpa une boite à biscuits en fer blanc dans laquelle elle rangeait ses photos. L’un des clichés représentait une vieille Renault d’il riccio reconnaissable à la licorne qu’il avait fixée sur le toit, la voiture ne ressemblait plus à rien après le dérapage incontrôlé qu’il avait fait et l’atterrissage dans un platane sous l’œil indifférent d’une vache ruminant devant son parterre de trèfles à quatre feuilles.

Sur une autre photographie il était torse nu, exhibant une musculature fine et puissante, à l’abdomen la cicatrice qu’elle avait tant de fois léchée avait laissé une boursouflure autour de la peau douce et musclée du ventre. C’était le souvenir d’une rixe violente à Barbès durant laquelle il s’était fait suriner. C’était son seul fait de guerre, pas de trace de balles reçues, il avait pris des châtaignes et s’était bien des fois présenté chez elle avec un œil aux couleurs de l’arc en ciel d’hiver. Hormis ce coup de couteau qui l’avait cloué deux jours dans un lit d’hôpital, il avait eu une chance incroyable.

« J’ai eu de toi ce que nulle autre n’aura et c’est l’essentiel » confia-t-elle à la photo qu’elle tenait entre ses doigts. « Je te chercherai, je t’en fais la promesse, je ne peux croire un seul instant que tu ne sois plus de ce monde ».

Elle posa la photo sur ses genoux et mis sa tête en ses mains, laissant libre cours à ses réflexions. Les souvenirs affluaient en abondance. Comme un tsunami il lui apparaissait souriant ou préoccupé, perdu ou battant, encaissant l’aubaine et la malchance sans y prêter attention  et comme la vague fonçant toujours droit devant.

Elle frissonna se disant « Cesare, je t’aime, tu me manques ».

Graziella la nurse italienne, étudiante à Paris, venait d’arriver avec Luigi qui se jeta dans les bras de sa mère, l’interrogeant : « On va voir papa samedi ? »

Sur une idée d’Olivia 

25 réflexions au sujet de « Cesare Liriccio (épisode 8) »

  1. AH HA? JJ’attendais que tu montres le bout de tes piquants pour venir te dire ce que j’en pensais ; j’aime bien l’intimité qui se créé mais on n’en apprend pas assez à mon goût…Impatiente moi ? Meu non… En tout cas, il prend de l’épaisseur ce petit voyou ! 🙂

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    1. Non, non c’est pas un voyou, c’est un flic Isa… oh !!!! 😀 Mais tout vient à point qui sait attendre, alors !
      Voilà je vais finir par toi après avoir commencé ma journée par toi, le répète pas c’est un secret. Heureusement ici y a pas de mauvaises pensées et on peut s’exprimer librement. Je travaille depuis 2 heures à répondre à ton défi parce que je m’en voudrais de ne pas être présent. Bises.

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  2. je découvre une jeune femme sensible et amoureuse, que le manque de l’autre rend nostalgique et triste alors que je la voyais dure dans son commissariat, prête au combat quoiqu’il arrive
    et ce personnage pour moi prend de l’ampleur, parce que plus humain

    belle et douce nuit-journée
    mille bisous
    sourire

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