Son meilleur endroit

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Bois de Vincennes ©JCG
Bois de Vincennes
©JCG

Il n’avait d’autre source d’inspiration que ce sous-bois dans lequel il aimait à se promener. À cette saison l’eau était gelée et le dénivellement donnait à cette cascade artificielle un air surnaturel.

Le hasard l’avait conduit là, il y a une décennie peut-être au moment où il avait eu besoin de prendre des décisions qui allaient engager sa vie.

Cette fois-là aussi c’était l’hiver et les arbres n’avaient plus une feuille et leur squelette dénudé dessinait des ombres chinoises sur un ciel blanc chargé de neige.

Le froid vif lui gerçait les lèvres, il camouflait ses mains dégantées au fond des poches de sa parka. Quelques branches d’arbres tourbillonnaient sous l’effet d’un vent plutôt glacial. Le spectacle était inattendu.

Bien sûr son troisième œil l’accompagnait, il ne restait plus qu’à immortaliser le paysage au travers de l’objectif et cadrer à sa manière. Pour cela, il devait se recroqueviller au maximum il voulait insérer un le plus possible de choses dans le champs de sa photographie mais la position qu’il s’imposait nécessitait une grande souplesse qu’il n’avait déjà plus. Il regretta aussitôt les apéros cacahouètes, les resucées de pommes de terre aux lardons, les plateaux de fromages bien garnis et les gâteaux à la crème dont il était coutumier.

À moitié allongé sur le sol gelé dans une position inconfortable, tout en faisant sa mise au point sur le filet d’eau figé, une question le hantait, l’après qu’en serait-il ?

Le jour déclinait malgré le ciel encore très clair la lumière disparaissait. Bien qu’une éducation stricte guida ses actes il livrait bataille contre lui-même, contre cette éducation corsetée qu’on lui avait imposé. Ses propres réflexions le faisaient rougir, il s’en souvenait.

Il appuya sur le déclencheur, maintenant le bouton enfoncé. Une rafale troubla le silence, il savait qu’en maintenant cette touche il capterait des instants qu’il n’aurait su saisir autrement.

S’il avait le sentiment d’être hypocrite à l’époque l’idée ne l’effleurait plus aujourd’hui. Il reconnaissait qu’il avait manqué de culot, qu’il avait avalé comme de l’eau bénite ce qu’on lui inculquait, sans discernement.

Cette clairière était son havre de paix. Il y venait pour méditer régulièrement à chaque saison. L’été les runners turban dans les cheveux, tenue flashy, courrait avec l’espoir de trouver une nouvelle jeunesse. L’hiver seul, assis sur une pierre il réfléchissait guettant un hypothétique goéland.

Chaque saison dans ce paysage lunaire l’intéressait sous le soleil ou la pluie, en plein froid comme en pleine chaleur. Il passait ses doigts sur l’eau du ru tiède ou gelée tout en répétant l’adage de sa mère : « Noël au balcon, Pâques au tison. »

Il avait créé la surprise en faisant son coming-out. Avouer son homosexualité lors de cette fête de famille l’avait beaucoup amusé.

 Les plumes

 Les plumes mensuelles d’Asphodèle vous pourrez y retrouver tous les autres participants.

38 réflexions au sujet de « Son meilleur endroit »

  1. Mon Choupi, ce ne serait pas plutôt « Coming out » ? Le Burn Out, c’est ce que j’ai fait et je suis pas gay, enfin, je crois 🙂 :p bon week end à toi, j’espère qu’il y a le même soleil que chez nous, nous on va en profiter car ton tete m’a donné froid 🙂 bisous

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    1. Tu sais Kristel j’ai déjà beaucoup de mal avec le français alors si j’use d’anglicisme je me plante ! 😀 En fait j’aurai peut-être besoin de faire les deux je crois. 😉

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  2. Oui Choupi, burning-out et coming-out sont deux choses différentes et pour le premier on ne se met pas l’Eglise à dos (quoique 😉 ) ! Je reconnais ton endroit préféré, propre à la méditation mais de là à changer de « bord », hein !!! 🙄 Tsss ! Un texte presque bucolique !!! 😆

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    1. Oui Choupinette ça me casse les burn ces anglicismes 😀 Il m’arrive effectivement d’aller à l’église et notamment dans la crypte juste parce que c’est un endroit tranquille. Maintenant j’irai avec le livre de Lao Tseu. 😀

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  3. Burn out, pourquoi pas; d’autant que le début du récit m’amenait vers autre chose que ce que j’ai lu. Burn, brûler, terre brûlée, tout brûler sur son passage, j’y ai vraiment cru…

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    1. Non , non seulement un grosse erreur de ma part… un mot pour un autre. Tu sais quand on fait le malin et qu’on est sûr de soi on se trompe ! 😀
      Mais ta façon d’imaginer les choses auraient pu être possible.

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    1. Chez moi on dit si tu ne sais pas tu te tais c’est ce que j’aurais dû faire. 😀
      Mes chutes sont parfois un peu abruptes et me permettent de quitter la scène par la petite porte.
      Bonne soire camarade. 😀

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  4. J’aime ces endroits privilégiées qui n’appartiennent qu’à nous, enfin, nous le pensons, et qui nous réconforte. La prochaine fois, se munir d’une paire de mitaines-hommes, fourrées de polaire, je parle en connaisseuse expérimentée, et d’une mini bouillotte à mettre dans la poche qui se réchauffe si on la broie, oui, bien sûr, …. à méditer

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    1. les mitaines j’ai toujours pensé que c’était inutile mais avec une bouillotte de poche quelle bonne idée merci ! 😀
      J’aime cet endroit qui n’est qu’un lieu de passage pour tout le monde mais moi je m’arrête, je regarde et il m’appartient. 😉

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  5. Je suis arrivée après la bataille en le sexe et le feu, mais j’ai quand même trouvé un endroit tranquille ! il y a des odeurs de menthe, et loin de tout, loin de soi, c’est là qu’on se sent chez soi !

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  6. Après mon come back tardif, j’ai manqué le burn out 😆
    Je m’attendais à tout, sauf à cette fin-là, Jean-Charles 😉
    Le résultat d’une éducation rigide et trop stricte, peut-être…
    Une drôle d’histoire et un bien joli endroit pour être en paix avec soi-même.
    Gros bisous

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  7. « Il regretta aussitôt les apéros cacahouètes, les resucées de pommes de terre aux lardons, les plateaux de fromages bien garnis et les gâteaux à la crème dont il était coutumier.
    Bon, ok pour les cacahuètes à l’apéro, il y a tellement de bonnes choses à grignoter à leur place. Mais renier les pommes de terre aux lardons, les plateaux de fromage et les gâteaux à la crème, NON ! Même un photographe planqué dans la rosée glaciale au bord d’un ru pas assez gros pour être en rut (faut attendre le printemps pour voir un tel spectacle !) n’aurait pas le cœur de faire ça ! NON ! En tous les cas, le paysage évoqué était bien joli, mais pour aller y faire un tour, j’attendrai aussi le printemps ! Brr… 😀

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  8. Au moins, il aura fait son coming-out, c’est toujours mieux qu’une tentative de suicide. Puis, le coming-out, on en sort vivant, en principe (enfin, sauf peut-être pour la famille rigide, justement).

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