Que reste-t-il de nos amours ?

       © Romaric Cazaux
© Romaric Cazaux

Oh rage ! Oh désespoir. Je t’aime encore. Tourner les pages de mon album est une mauvaise idée. Réveiller les souvenirs est plus douloureux que je l’imaginais. Putain, je t’aime toujours. Mon cœur souffre encore.

Tu sembles heureuse, sans moi. Est-ce possible ! Tu es belle. Je l’aime. Je suis trop bête. J’ai eu peur de te suivre, persuadé que tu resterais. Je suis franchouillard comme c’est pas permis et l’idée de franchir la Manche m’est insupportable. Quand je regarde cette photo, je m’en veux, je m’insulte. Je me maudis.

Je me fous du protocole. Je me fous de la Reine. Ce que je souhaite c’est d’être près de toi. Plutôt à Versailles qu’à Buckingham. T’es belle, tu sais. Les cheveux courts te vont particulièrement bien.

Une fois de plus j’ai écouté ma mère pourtant j’aurai dû me douter que c’est elle qu’elle privilégierait. Son égoïsme forcené est redoutable. J’aurai dû te suivre. M’échapper de ses serres.

J’en pleure. J’en crève. C’est trop tard.

Comme le ridicule ne tue pas, j’ai pris l’avion jusqu’à Heathrow. Je suis monté dans un vieux cab, sans comprendre le moindre mot de ce que baragouinait le chauffeur. Il m’a mené à l’adresse que j’avais inscrite sur un morceau de papier. J’ai attendu. Il est parti. J’ai passé la journée à regarder les gens entrer ou sortir.

Je suis revenu à Paris sans t’avoir aperçue. Encore un coup de Trafalgar.

Dépité, malade, honteux mais fier d’avoir provoqué la chance quand bien même ce fut un fiasco. À mon retour, j’ai eu une violente altercation avec ma mère, lui reprochant, tout et rien. Je suis furieux contre moi, contre elle, furieux d’avoir accédé à sa demande, furieux de m’être fait manipuler.

Elle m’a offert un autre billet pour Londres.

Je t’ai retrouvée, vue, épiée, photographiée en tremblant comme un adolescent. Sans oser t’aborder. Je t’ai regardée traverser d’un pas décidé. Les cheveux courts te vont bien. Le ciel était menaçant. Je ne t’ai pas abordée. Je n’ai pas tourné la tête pour ne pas savoir vers qui tu te précipitais.

Ma mère m’a giflé le soir après m’avoir tiré les vers du nez.

Merde ! L’amour et moi c’est quoi !

Je suis puceau à dix-huit ans. Les seules sensations que j’ai offertes à mon corps sont celles que je lui ai données. J’ai honte. Je ne maitrise rien.

J’ai tellement peur. Je me sens si ridicule. J’ai tellement envie de te serrer dans mes bras. Rien que d’y penser j’en ai le feu aux joues.

Des fois j’ai envie de me gifler. Zoe je t’aime mais je crois que je n’oserais plus  jamais te le dire.

J’ai brûlé cette photo dans la cheminée. Elle me faisait trop de mal me rappelant cette amour impossible.

Puis j’ai regardé Bob d’un œil différent. Il est sensuel, souriant, me fait craquer Je m’interroge. J’ai passé une heure inoubliable avec lui dans l’avion. Puis d’autres encore après. 

Londres, Buckingham sont-ils, sans que j’en connaisse la raison, les déclencheurs de ma féminité ? une-photo-quelques-mots1-300x199

Photo publiée à l’atelier d’écriture de Leiloona

 

  

15 réflexions au sujet de « Que reste-t-il de nos amours ? »

    1. La mère possessive 🙂 image bien facile pourtant. Je crois que les ados sont assez volages et bien peu fidèles. Alors Zoé est sans doute dans le compartiment « amour difficile » dans le troisième valvule cardiaque.

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  1. Ah je ne trouve pas que ce texte soit « convenu »… en tout cas, il sonne juste et je me suis laissée embarquer par cet amour adolescent ! J’aime beaucoup le personnage de la mère.

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  2. J’aime bien la figure très « clownesque » de la mère, et puis ce revirement de situation : et si l’impossibilité d’un amour signifiait en fait autre chose ? Brrr, pensée bien trop abyssale pour moi.

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