Et toujours les plumes de l’été
Debout sur le sable je regardais l’agitation de la plage. Ici des gosses couraient au bord de l’eau, s’éclaboussaient en poussant des cris stridents. Là, des adolescents, disposés en étoile, refaisaient le monde, se passant l’un, l’autre, cigarettes ou sodas, tout en discutant du dernier cd de Justin Bieber. Plus loin des trentenaires, dos à dos, la Ray-ban ajustée, tandis qu’elle était plongée dans son roman policier, lui semblait rêver d’un autre monde en zieutant l’horizon. Par ici des sexagénaires affichaient leur adoration pour le soleil alors que lui complétait d’un air suffisant les mots croisés de son quotidien elle, debout, une main en visière et l’autre glissant sous l’élastique pour remettre la fesse échappée d’un maillot réfractaire, fixait la mer vert émeraude se demandant : « Je le quitte ou je reste encore ? »
Le tableau estival ordinaire s’étalait sous mes yeux. Quelles que soient les années la plage ne changeait pas, la scène restait immuable. Seuls les maillots de bain et l’espace vital diminuaient au fil du temps. Même les odeurs évanescentes des corps surchauffés remplissaient l’atmosphère. Mon corps réclamait aussi la chaude étreinte de l’astre céleste.
Je me sentais comme un éléphant dans un jeu de quilles. J’avais l’impression que tous les regards convergeaient vers moi parce que je m’étais copieusement tartiné de mon écran solaire pour ne pas finir la journée, rouge comme une écrevisse. Depuis deux semaines j’absorbais l’élixir soigneusement préparé par mon apothicaire pour éviter de me brûler la peau et refuser au mélanome de me posséder vicieusement. J’avais avec l’âge comme une étincelle de bon sens qui faisait que je m’accrochais à la vie comme un panda à son eucalyptus.
J’avais subitement envie de me rouler dans le sable, de dire merci à l’univers, d’être encore plus enthousiaste pour tout ce qu’il me restait à vivre mais le regard excédé de cette jeune femme en face de moi me piquait au vif. Pensait-elle que je lorgnais son corps alangui alors que je n’écarquillais et clignais des yeux que parce qu’une lumière violente m’aveuglait ?
Je regardais amusé l’éventail les positions que chacun s’infligeait pour offrir son corps à la caresse du soleil. Pourtant même si ces postures suggestives en d’autres temps me mettaient au supplice, aujourd’hui j’étais de marbre comme évanoui, transi par une fraîcheur soudaine.
Je me frottais les yeux pour m’ôter les idées de la tête, malgré la chaleur je sentais la morsure du froid m’envahir, mais…
Mais ce n’était pas le moment d’abandonner mes rêves alors que le scialytique m’éclairait en plein visage et que l’anesthésiste répétait son élégie en boucle : « Laissez-vous aller monsieur, laissez- vous aller, détendez-vous… » Le chirurgien, le scalpel à la main attendait d’intervenir.
Voici les mots de cette semaine en « E » :
élixir – estival – évanescent(e) – émeraude – évanoui(e) – étincelle -élégie – écrevisse – éléphant – excédé(e) – éventail – étreinte – eucalyptus.
Extra l’élégie de l’anesthésiste!
Je me croyais pour de vrai à la plage ! Quelle chute
extra aussi l’éléphant dans le jeu de quilles : cela change du magasin de porcelaine
J’aimeJ’aime
Ravi qu’il en soit ainsi 😛 j’ai aussi rigolé en écrivant avec mon panda dans l’eucalyptus.
J’aimeJ’aime
Ah ! les hallu pré-opératoires ! Excellente la chute ! J’aime aussi beaucoup quand tu vas à la plage ! 🙂
J’aimeJ’aime
La plage et moi, bien longtemps que nous ne nous sommes pas croisés 😀 peut-être un brin de nostalgie ! Quant à l’hallu cela m’a semblé tellement facile que je me suis demandé si je n’allais pas me faire huer 😀
J’aimeJ’aime
Quelle chute ! 😮 Tu nous ramènes tout droit à la réalité !
J’aimeJ’aime
Je voulais éviter de le faire tomber dans l’escalier 😯 et il fallait revenir à la réalité rapidement 8)
J’aimeJ’aime
Oui! une belle chute! et tellement inattendue et brutale que l’on tombe de haut! Normal, me diras-tu, pour une chute!
J’aimeJ’aime
Oui ! 😀 et tomber de la table me semblait dangereux 😀 😛
J’aimeJ’aime
On se croit vraiment à la plage, et tout rappelle l’été jusqu’à la chute! Terrible !
J’aimeJ’aime
Merci… La plage est de saison et si le temps s’y prête peu en rêver est un sel de plus 😛
J’aimeJ’aime
c’est marrant comme un mot nous aide au fil conducteur, pour toi ce fut « estival » et moi « éventail » 😉 C’est marrant les analogies aussi, pour toi, l’éléphant est dans un jeu de quilles, moi dans un magasin de porcelaine. Outre les talents d’écriture, ce jeu nous dévoile aussi les méandres du cerveau humain, la personnalité etc..:-)) J’aime ce mélange d’humour savamment dosé avec un fil conducteur fluide et bien narré ! plein de bon sens ce Jean Charles, rondement menée la barque, même pas mal !:-)
J’aimeJ’aime
Oui à chacun son imaginaire et son fil conducteur ce qui nous permet des textes aussi diversifiés 😀 Très flatté par ton commentaire il va falloir que je fasse attention à ne pas me prendre la grosse tête 😀 😛 😀
J’aimeJ’aime
Quelle surprise cette dernière phrase ! Je croyais être sur une plage… en Corse… pour me retrouver glacée au bloc.
J’aimeJ’aime
J’ai amené insidieusement le froid…pour que tu ne tombes pas de haut ! ^_^ 😉
J’aimeJ’aime
Hello ! impressionnée sûrement par « un » blogueur écrivain et petit nouveau dans la bloguosphère, j’en ai perdu le début de mon commentaire !
Je reprends. Moi aussi, je me suis laissée avoir ! C’était si vrai… si loin de ces divagations juste avant une opération, déjà un peu grogui par la petite pilule ingurgitée juste avant que le lit roule dans les couloirs infinis, poussé par l’infirmier indifférent, se cogne dans l’ascenseur, attende un long moment dans le couloir avant de rentrer dans la salle d’opérations glacée, illuminée et aseptisée !
J’ai subi quelques opérations, mais si mes souvenirs sont bons, je n’ai jamais rêvé et encore moins imaginé une scène de vacances ! lol !
J’aime beaucoup aussi ! Heureusement qu’Asphodèle ne nous demande pas un classement pour ces 26 participants, je ne saurais pas organiser un trio gagnant !
Peut-être @ plus
Amitiés de Lyon
J’aimeJ’aime
Merci… Je suis sûr que si prochaine opération il y a, ce que je ne souhaite pas, une petite pensée pour les vacances détendra l’atmosphère. Il est vrai que ce qui marque c’est bien l’enfilade des couloirs et de l’ascenseur. Mais voilà j’en ai fait autrement.
@ bientôt.
J’aimeJ’aime
L’évocation de la plage est tellement réussie que j’ai l’impression de sentir le monoï… Je croyais que les hallucinations, c’était au réveil, après l’opération! En tout cas, je me suis laissée surprendre par la chute.
J’aimeJ’aime
Ravi que le monoï ait chatouillé tes narines 😀 Les hallucinations viennent à n’importe quel moment il suffit juste de trouver le joint 😛 8)
J’aimeJ’aime
Comme tous et toutes, piégée par la chute, extra ! Mais ton texte est aussi très bien écrit, on sent la soleil nous bruler et pourtant, c’est plutôt la pluie qui nous va finir par nous noyer ici! Belle réussite.
J’aimeJ’aime
Ah si tu sens le soleil sur ta peau et que tu as l’odeur du monoï dans le nez, c’est que tu n’es sûrement pas à Paris pour l’instant ^_^ Merci d’être tombée dans le piège ! 😛
J’aimeJ’aime
la fin, un rappel à l’ordre… la vision de la plage était beaucoup plus agréable
J’aimeJ’aime
Sans doute ! Mais il se cache souvent des choses désagréables derrière des moments agréables, n’est-ce pas ? ^_^
J’aimeJ’aime
:)) Beaucoup aimé!! ça sent les années de plage ;))
La chute est géniale!
J’aimeJ’aime
^_^ En fait ça sent les années de manque peut-être, trop longtemps que je ne suis pas allé au bord de la mer. Merci pour la chute 😀
J’aimeJ’aime
j’ai beaucoup aimé la description des générations, leurs préoccupations, comme un éventail des âges ! et comme toujours un grand plaisir de voir comment chacun s’en sort avec les mots imposés !
J’aimeJ’aime
Je ne sais si le tableau est fidèle aux tranches d’âges mais en tout cas chacun peut y trouver sa réalité. Ecrire et partager n’est-ce pas une belle réussite ? 😀
J’aimeJ’aime
J’ai moi aussi beaucoup aimé ! Moins la chute d’ailleurs que le début du texte. Note bien que ça n’a rien à voir avec la chute elle-même (j’avoue : j’ai aussi marché !), mais plutôt avec la grisaille de cet été ! Passer un moment sur la plage, ça fait du bien, même si c’est une hallucination ! 🙂
J’aimeJ’aime
Oui le soleil nous manque à tous, en ai-je profité pour vous rappeler qu’il existait et vous faire rêver de lendemains étouffants ? ^_^ 😛
J’aimeJ’aime
Je n’ai qu’un mot: BRAVO! dans mon petit top 20 personnel, je crois bien que je vais mettre à la première place ton délire chirurgical…Ah la fesse échappée d’un maillot réfractaire! c’est proprement génial.
J’aimeJ’aime
Oh, merci ! Je reste presque sans voix. Ecrire ce petit texte par les temps pluvieux que nous endurons fut une bouffée de chaleur dont mon corps avait besoin. Quant à la fesse… c’est un souvenir que je garde de la plage. 😀 Tes textes valent le détour, performance remarquable. En tout cas c’est un plaisir de participer.
J’aimeJ’aime
Des petites pépites, certaines phrases ! Et j’adooore la chute !
J’aimeJ’aime
Oui Olivia j’imagine bien comment tu ferais évoluer le suspens après une chute qui laisse une part belle à l’angoisse 😀 😀
J’aimeJ’aime
Oh ! la chute….. belles images pour s’endormir, peut-être pourrais-tu continuer pour nous dire ce que tu as raconté à l’anesthésiste au….réveil !
J’aimeJ’aime
Es-tu sûre de vouloir le savoir ? Le langage tenu au réveil n’est pas dévoilable ! 😀 😀
J’aimeJ’aime
Oups! Deux surprise pour moi…
D’abord, j’ai lu ce texte sans savoir qu’il fut écrit à partir d’un défi à relever, donc bien étonnée de constater qu’il ne fut pas rédigé dans un esprit sans contraintes. :-0
Et, évidemment, surprise par sa finale! 🙂
J’aimeJ’aime
Oups! »surpriseS » 😉
J’aimeJ’aime
J’espère au moins que tu n’es pas tombée à la renverse Jennie !!! 😛
J’aimeJ’aime